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L'accès aux cartes dans les bibliothèques



N.B.: travail d'étudiant réalisé dans le cadre de la rédaction d'une "fiche pratique" de l'Enssib (deux pages maximum): à lire avec précaution et indulgence. Ne pas hésiter à signaler les erreurs et autres approximations.

1. Difficultés d’accès aux documents cartographiques

L’accès aux documents cartographiques via les Opac traditionnels, outils privilégié de l’accès à l’information primaire, n’est pas toujours simple et ce dans la mesure où l’intégration du document cartographique dans un catalogue suppose toujours la traduction en mots d’une image.

De fait, là où titre et auteurs fournissent un accès privilégié aux monographies, il n’en va pas de même pour les cartes : le titre, souvent peu significatif (car souvent formé sur un modèle carte, thème, lieu, échelle ; ex : carte topographique de la France au 1/25 000), et l’auteur pas toujours mentionné doivent être étoffés par d’autres données : échelle, date… En outre, quand bien même on chercherait un document géographique par le nom du lieu qu’il représente, l’absence de consensus normatif international rend aléatoire les résultats de la requête : on trouvera des documents allemand, polonais ou français suivant le terme choisi (Danzig, Gdansk ou Dantzig). Si l’on peut parfois trouver un secours avec la norme ISO 3166 (code pays et principales subdivisions régionales), elle n’est pas assez fine ; à tel point qu’elle n’est que rarement employée dans les catalogues de bibliothèque. Pour les autres lieux, ceux ne disposant pas d’un code normé, il n’existe qu’une norme décrivant la formation et la structuration des vedettes noms géographiques (NF Z 44-081). Elles ne suffisent pas à résoudre le problème de l’accès aux cartes par vedette géographique.

A ces difficultés dues à la nature du document s’ajoutent deux obstacles propres aux Opac.

La plupart des interfaces publiques ne permettent pas d’interroger les champs spécifiques aux données géographiques (échelles, type de projection, ou coordonnées géographiques).

Pour permettre un accès aisé aux cartes publiées en série, qui représentent aujourd’hui la majeure partie de la production cartographique, il faudrait pouvoir lier deux notices l’une à l’autre : celle de la série (carte topographique de la France au 1/25 000) suivie de celle de la feuille concernée (Loudun est, 17-43). Or, si cela n’a rien d’infaisable en soit, reste que la liaison de notices rend délicat, voire impossible, l’échange des notices.

Le document cartographique semble donc requérir des outils de catalogage spécifiques afin de fournir aux lecteurs un accès le plus ergonomique possible. C’est pourquoi plusieurs projets de catalogue de cartes tentent de répondre à ces difficultés en prenant acte des progrès informatiques et du développement des Systèmes d’Information Géographique (SIG).

2. Des bases de données spécifiques

La première étape a été de constituer des bases de données spécifiques aux documents cartographiques et détachées en partie des Opac traditionnels. Cela a permis non seulement de s’affranchir des normes de catalogage afin de fournir des accès spécifiques aux cartes (par type de carte, échelle, lieu ou coordonnées) mais aussi d’ajouter des tableaux d’assemblage numérisés. On peut trouver un exemple remarquable d’une telle démarche avec le catalogue de la Cartothèque de l’Université Paris 8. Il permet des requêtes spécifiques (coordonnées ou échelle) voire une recherche via une interface graphique. Cette dernière automatise par un simple clic sur la zone géographique recherchée une requête vers la base de données par nom de lieu. Seul bémol, mais mineur au regard des moyens à disposition (une seule personne a conçu et mis en place ce catalogue !), cette base de données est relativement fermée: normes et formats de catalogage n’étant pas scrupuleusement respectés, l’intégration dans le Sudoc requerrait un développement informatique spécifique, pour au final gommer les spécificités de cette base et donc, son indéniable plus value.

C’est ce problème de l’« insularité » qu’a tenté de résoudre la Staatlische Bibliothek zu Berlin, avec des moyens d’une toute autre ampleur : Elle a ainsi mis en place une « Topo-List », qui permet via le nom du pays de présenter les différentes séries cartographiques le représentant, tableau d’assemblage numérisé à l’appui. La Topo-list et l’opac traditionnel fonctionnent en parallèle : chacune des séries a sa notice dans l’Opac de la bibliothèque et le lien vers le tableau d’assemblage numérisé est également présent dans la notice du catalogue. Si cette Topo-List n’est pas à strictement parler une base de données, elle démontre néanmoins une conscience aigue de ce problème d’isolement. Il conviendra de voir comment il sera pris en compte par GOKaRT (voir supra).

Reste que ces réalisations, si elles constituent une avancée de taille dans l’accès aux cartes, ne résolvent qu’une partie des problèmes. Ce n’est qu’avec l’adjonction d’un géoréférencement des cartes que l’interface graphique prend sa véritable dimension.

Adjonction d’interface graphique de recherche et géoréférencement via un Système d’Information Géographique (SIG)

Plusieurs projets sont en cours avec des états de développements différents. Tous néanmoins désirent mettre en place une interface graphique permettant de repérer les documents intéressants. Mais contrairement à l’astucieux système de la cartothèque de Paris 8, il ne s’agit pas de l’automatisation d’une requête par nom de lieu mais bien d’un véritable géoréférencement des cartes. Chaque feuille est référencée dans un SIG couplé à la base de données, permettant ainsi une requête par coordonnées spatiales. Voici les principaux projets.

Allemagne : La Staatlische Bibliothek zu Berlin a annoncé en 2008 au congrès Liber le lancement du projet GOKaRT (Graphischen Online Karten Recherche Tool) en partenariat avec la Bibliothèque universitaire de Gôttingen. La spécificité de GOKaRT est de faire appel à des logiciels libres, ce qui permettrait une large diffusion de l’outil développé. Reste que peu de renseignements sont actuellement disponibles sur l’état d’avancement du projet.

Suisse : Dans le cadre du Kartenportal, portail consacré aux cartes de la Bibliothèque électronique Suisse, l’ETH de Zurich développe une interface graphique de recherche. Ce portail regroupera à terme (prévu pour 2011) non seulement un catalogue collectif suisse des documents cartographiques mais aussi un accès aux cartes numérisées et aux données cartographiques issues de SIG.

France : La Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme est en train de développer, en partenariat avec la BnF, le Comité Français de Cartographie, l’IGN et Géoréseau (réseau des cartothèques de France), un catalogue collectif consacré aux cartes : Cartomundi. Il est destiné à devenir un accès privilégié non seulement aux états de collection des cartothèques participantes, mais aussi à leurs documents numérisés. Chaque série est géoréférencée via son tableau d’assemblage et c’est ce même tableau d’assemblage qui permet de voir l’état de collection de la bibliothèque participante. Si on peut déjà avoir un aperçu via CartoMed, le lancement de Cartomundi est prévu pour mars 2011.

L’accès aux documents cartographiques semble donc en bonne voie. Mais le risque que courent en partie ces bases de données est de se couper des traditionnels Opac. A cet égard, l’articulation mise en œuvre par la Staatslische Bibliothek zu Berlin entre sa Topo-list et son catalogue est à retenir. En outre, on peut espérer que la prise en compte croissante des Frbr facilitera le dialogue entre catalogues de bibliothèque et outils spécifiques à la documentation cartographique.

Bibliographie
Coste, Hélène, « La place des cartes et plans en bibliothèque », BBF, 2007, n° 4, p. 36-43.
Richard, Hélène, « Le département des Cartes et plans de la Bibliothèque nationale de France », BBF, 2007, n° 4, p. 44-48.
Geisler, Felix, Erschliessung Kartographischer Materialen : Ein Update, Berlin, Institüt für Bibliotheks und Informationwissenschaft der Humboldt-Universität zu Berlin, 2009.[http://edoc.hu-berlin.de/docviews/abstract.php?id=30188]
McEathron, Scott R., “Cartographic Materials as Works”, Cataloging and Classification Quaterly, 2002, 33-3, p. 181-191.
Kalf, Ruth, “FRBR: an Opportunity for Map Collections and Map Users?”, Liber Quaterly, 2008, 18-2, p. 276-291.[http://webdoc.gwdg.de/edoc/aw/liber/lq-2-08.html].
Schüler, Methild, Crom, Wolfgang, “GOKaRT: Graphical Online Search Tool for Maps”, Liber Quaterly, 2008, 18-2, p. 299-303.[http://webdoc.gwdg.de/edoc/aw/liber/lq-2-08.html]
Arnaud, Jean-luc, “A new Website for Cartographic Resource: Cartomundi”, Liber Quaterly, 2008, 18-2, p. 271-275 [http://webdoc.gwdg.de/edoc/aw/liber/lq-2-08.html]

Webographie
Cartothèque de Paris VIII
Topo-List :http://staatsbibliothek-berlin.de/kartenabteilung/recherche-und-ressourcen/topo-liste.html
Kartenportal: http://www.e-lib.ch/geoinfo_f.html http://www.kartenportal.ch/projekt-raeumliche_suche.htm
Cartomundi : http://cartomed.mmsh.univ-aix.fr/


Valérie Schietecatte