Journal de la Carto - Février 2019
Un constat : les études n'en sont qu'à leurs débuts. Ce qu'observent les rapports comme celui de l'INRA en décembre 2017, énorme pavé de 600 pages qui présente l'état des lieux sur l'artificialisation des sols, à partir de 2500 références bibliographiques. Il reprend tout le contexte de la destruction des sols : urbanisation, périurbanisation, extension des transports et de la logistique avant de détailler l'impact qualifié de négatif à très négatif sur faune, flore, ruissellement, îlots de chaleur urbain etc.


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Vous avez tout un chapitre détaillé sur les entrepôts ; le rapport constate leur forte croissance (en 2009, 645 communes franciliennes sur les 1281 accueillent des espaces logistiques) et la lie à trois facteurs : l’externalisation de la logistique, la mondialisation des échanges, le développement de nouvelles consommations urbaines.

La conclusion est toutefois d'une timidité de biche : Dans la mesure où les effets observés des différents facteurs d’artificialisation sont généralement négatifs, on peut recommander, d’un point de vue très général, de limiter l’emprise des zones artificialisées, par exemple en réutilisant des zones déjà artificialisées comme des friches industrielles ou urbaines, et/ou de densifier les zones artificialisées existantes plutôt que de les étendre.
Cet article de 2014 publié dans Cybergéo n'a pas la même approche. Il considère que Le développement urbain et périurbain est l’une des causes les plus sous-estimées de destruction des sols. Or, les sols sont une ressource essentielle, car ils sont nécessaires à toute production de biomasse, non seulement pour assurer la production de ressources alimentaires mais également pour la protection des espèces vivantes..

Loin de s'en tenir à une recommandation très générale, il réclame une cartographie fine des sols, sur des échelles locales aux échelles nationales voire européennes afin que les documents d’urbanisme prennent en compte les potentialités des sols. Et il juge essentiel que les sols ne soient plus perçus comme un patrimoine privatif, dont les propriétaires ont libre usage, pour être considérés comme un patrimoine commun, au même titre que l’air, l’eau ou les paysages.

Petit insert : parler d'artificialisation des sols est un bel euphémisme. D'abord, c'est difficile à prononcer, encore plus à écrire et de plus, ce terme noie le poisson. Un entrepôt et un jardin public sont des sols artificialisés mais la réalité est différente. Bitumisation serait déjà plus exact.



Les propositions de l'article, pour tranchées qu'elles soient, ne semblent pas adéquates. Que l'eau soit un patrimoine commun ne change rien à sa commercialisation, encore moins à sa pollution... Empêcher le libre usage de la propriété foncière, mesure radicale s'il en est, sape l'un des piliers de notre société bien au-delà de l'objectif de préservation des sols.

Faut-il alors attribuer une valeur aux sols ?
Cartothèque de l'Université Paris 8