Journal de la Carto - Février 2019
Résumons : les consommateurs poussés par un marketing intensif désirent que leurs envies de marchandises soient satisfaites illico presto. Ils déclenchent et satisfont cette envie en fournissant l'effort d'appuyer sur le bouton Buy it now de leur portable.



Par ce geste, ils contribuent à faire pousser les entrepôts géants, maillon essentiel d'une nouvelle chaîne logistique appuyée sur les nouvelles technologies. Devenues la coqueluche des investisseurs, ces constructions détruisent les sols (et les emplois) et génèrent un accroissement de pollution atmosphérique, sonore et visuelle.



Imaginons que la cartographie analyse la qualité du sol de notre future plate-forme logistique et lui attribue une valeur selon l'impact de son artificialisation : destruction plus ou moins définitive de la faune, de la flore, conséquences sur le ruissellement, les inondations, le réchauffement de l'air etc.
Si le fournisseur logistique intègre ce coût dans l'achat, la pression sur les communes sera renforcée d'autant. Et surtout, la valeur des sols fluctuera selon les règles de l'économie donc dans une perspective à très court terme incompatible avec sa préservation sur le long terme.

C'est ce que développe Nicolas Bouleau dans ses livres et sur son blog. Dans cet article sur Combien coûte la nature ?, il constate ceci :

Considérons une zone marécageuse de grande valeur de biodiversité en compétition destructive avec un gisement d’énergie fossile, les deux raretés n’évoluent pas de la même façon. Il y a d’un côté des fluctuations vives et aléatoires pour le cours de l’énergie fossile, et de l’autre des ajustements progressifs de services éco-systémiques. Le gisement sera un jour ou l’autre coté au-dessus des estimations savamment calculées pour le marais.

Autrement dit, l’idée d’attribuer des prix élevés à l’environnement pour le préserver, non seulement se heurte aux intérêts divergents comme on le voit pour les émissions de carbone, mais, en logique néolibérale, se place sous le régime de la forte agitation, ce qui lui ôte toute efficacité opérationnelle.
Pour pouvoir tenir, il faudrait que le marais soit couvert contre ces risques avec des produits dérivés. Autrement dit, cette logique voudrait qu’on paie une assurance régulièrement tous les ans pour préserver l’environnement dont le coût dépendrait de la pression des intérêts économiques.
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En attendant de lancer la réflexion à ce niveau fondamental, les entrepôts géants se développent et renforcent la division spatiale entre les métropoles et leur extérieur. Cette nouvelle offre de consommation basée sur les possibilités de la technologie modifie sans leur consentement le mode de vie des habitants qui en subissent les contrecoups physiques et sociaux.
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Cartothèque de l'Université Paris 8