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Rencontre avec Angela Casal, étudiante et salariée

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis étudiante en Master 1 recherche et salariée dans le même temps. Précisons que la géographie occupe de plus en plus de place dans ma vie, en particulier cette année. Plus on avance et plus on prend conscience du manque de connaissances.

Pourquoi avoir choisi des études de géographie ?
J'étais curieuse de cette discipline parce que je n'en percevais pas très bien les délimitations : elle touche un peu à tout. Très rapidement, je me suis rendu compte que mon regard changeait vis-à-vis de ce qui nous entoure. On attrape un « regard conscient » de l'espace et de son organisation.

Jusqu'ou envisagez-vous de poursuivre des études ?
Initialement, je pensais m'arrêter après la licence mais aujourd'hui je n'ai plus envie de m'arrêter.

Vous êtes salariée ?
Jusqu'à cette année, j'ai pratiquement toujours été salariée à temps plein en Alphabétisation et Français Langue Etrangère. Quand l'opportunité se présentait, il m'est arrivé de travailler dans le cadre de spectacles de théâtre, de festivals. Actuellement je suis assistante pédagogique en lycée pro, à mi-temps, ce qui devrait me permettre de clore mon master en un an. Bien plus que ma compétence géographique, c'est ma formation en FLE qui m'a permis d'obtenir cet emploi.

Quelles difficultés rencontre un étudiant salarié ?
C'est surtout une question d'emploi du temps. On ne choisit pas les cours que l'on va suivre en fonction de notre intérêt. Et le temps et l'énergie ne sont pas toujours au rendez-vous. De plus, le travail de recherche est perturbé par des coupures, on ne peut pas se concentrer en continu.

Et quels sont les atouts de cette situation ?
La journée ne s'achève pas avec la journée de travail et on fait connaissance avec plusieurs réalités à la fois.

Que conseilleriez-vous aux étudiants géographes ?
Ne pas perdre de temps, lire beaucoup, le plus possible ! Il est fondamental d'être le plus curieux et le moins figé possible. Je les invite à déplacer leurs repères et à se déplacer eux-mêmes par rapport aux repères qu'ils ont. A tout questionner sans relâche.

Quel est votre thème de recherche ?
Je me suis focalisée sur l'étude de l'espace à travers la place qu'occupent les animaux. Plus largement, l'idée de questionner l'espace à travers n'importe quel point de départ me plaît. S'il est vrai que l'homme occupe une position centrale en géographie, on peut également questionner l'espace différemment, en replaçant l'homme dans le milieu parmi d'autres éléments, une pièce comme les autres dans un puzzle. Cette année je me consacre au pigeon dans le milieu urbain et les influences des structures urbaines sur sa répartition.

Vous avez choisi une approche « marginale » en géographie pour ce premier travail de recherche. Quelles compétences et quelles connaissances devez-vous mobiliser ?
Dans mon cas, j'ai dû prendre contact avec les sciences naturelles et assimiler les fondamentaux. Je suis obligée d'aller puiser dans l'éthologie, dans l'urbanisme aussi, dans la sociologie. Concrètement, je vais chercher dans l'éthologie des éléments pour comprendre le comportement du pigeon, en sociologie un éclairage quant aux représentations et à la position de la société vis-à-vis de ces animaux, par la philosophie et le droit, je vais chercher à comprendre leur « statut », etc.
Il me semble que de plus en plus de conférences, de masters sont portés par une forme de pluridisciplinarité. Mais cela n'est pas nouveau, c'est à la base de la pensée humaniste bien qu'il ait eu une nécessité de poser des frontières pour définir chaque science. Dans la réalité rien n'est cloisonné. Mais bon, je dois tout de même rester vigilante pour ne pas glisser dans l'éthologie !

Avez-vous déjà une idée concernant un futur métier ?
Si c'était possible, j'aimerais beaucoup exercer un métier où je puisse me consacrer à observer, étudier les espaces où une espèce animale x évoluerait.

Comment accéder à l'information dans des disciplines connexes à la sienne ?
On y arrive d'abord par des recherches personnelles. Les articles scientifiques ne sont pas nécessairement complexes, en revanche dans mon cas la difficulté consiste surtout dans le fait qu'ils sont pour la plupart publiés en anglais avec des termes que je ne connaissais pas forcément. Puis tout au long des recherches, j'ai eu la chance de rencontrer des personnes qui m'ont donné accès à davantage de documentation.

Quels outils utilisez-vous pour ces recherches documentaires ?
J'ai recours aux catalogues de différentes bibliothèques universitaires, au Sudoc, et à plusieurs bases de données (CAIRN / JSTORE). Egalement, les documents vidéos et la filmographie m'ont aidée. Mais les bibliographies sont l'outil le plus précieux. Elles permettent d'identifier les fondamentaux (les Bibles du sujet !) et de percevoir comment d'autres chercheurs se positionnent par rapport au sujet. La bibliographie donne aussi la mesure de ce qui se fait (ou ce qui s'est fait) dans l'étude d'un sujet, quelles disciplines l'abordent et lesquelles le boudent.
C'est très intéressant d'analyser cet aspect-là. On considère notre étude au travers des tendances générales d'une époque. Aujourd'hui, concernant les pigeons, les études mettent l'accent sur la question du risque sanitaire, de la gestion qu'il faut en faire. Entre 1930 et 1970, on s'intéressait plutôt au pigeon voyageur, aux comportements de l'espèce, mais on ne le situait pas forcément dans la ville tel qu'on peut le voir aujourd'hui autour des thèmes de la biodiversité et de la ville durable.

Et pour le jeune chercheur, quels conseils ?
Toujours en appeller à la curiosité même s'il est fondamental de s'entourer de garde-fous qui permettent de recadrer fréquemment la recherche. Il est très tentant et très facile de partir dans tous les sens. Dans le cadre d'un master, c'est le directeur de mémoire qui joue ce rôle.

Juin 2012